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Le - Marne : des gendarmes pour labourer la campagne

La «brigade territoriale de contact», ici le 6 avril, sillonne le territoire à la rencontre des habitants isolés.

La «brigade territoriale de contact», ici le 6 avril, sillonne le territoire à la rencontre des habitants isolés. Photo Laurent Troude pour Libération

Comme dans 24 autres départements, une brigade a été spécialement détachée pour renouer le lien avec les habitants.

C’est un pays de bois et de colza qui défile derrière les vitres de la petite Clio des gendarmes. Un pays où les fermes se nichent au creux des vastes plaines, loin, très loin des centres urbains. Ce matin-là, la brigade territoriale de contact (BTC) de Sainte-Menehould (Marne) sillonne le sud du canton. Au programme, ni contrôles routiers ni procédures judiciaires. Il s’agit juste de rencontrer les habitants les plus isolés, de recueillir des renseignements utiles, de rassurer, et de parler. Encore et encore.

Durant six mois, l’adjudant-chef Lydia Tadeous, ainsi que les trois gendarmes placés sous son autorité, ont quasi carte blanche pour reconquérir un peu du lien délité au gré des saignées budgétaires. Il y a bien longtemps, les pandores nommaient cette partie de leur mission «la surveillance générale». L’initiative, entamée en février, s’étire sur 24 autres départements. A son terme, la Direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN) évaluera le dispositif, qui semble avoir déjà conquis les administrés.

Salades.Sur les hauteurs de Villers-en-Argonne, à l’endroit même où tombèrent nombre de braves à la fin de la Grande Guerre, la Clio se range à l’ombre d’une étable bondée de vaches laitières. Le visage interdit du paysan montre que, pour lui, la vue des gendarmes rime encore avec arrivée des ennuis. Il enclenche la première et file livrer quelques stères de bois. Reste le fils, un trentenaire bien bâti, lui aussi un peu interloqué. La discussion se noue sur la taille des salades. Mais ripe rapidement sur les cambriolages, plaie locale.

En effet, campagne ne rime pas forcément avec tranquillité. «Les réseaux criminels n’aiment rien moins que le calme pour établir leur base arrière, témoigne le colonel Olivier Courtet, qui dirige le groupement de la Marne. Ce n’est pas parce que la densité est très faible [15 000 habitants répartis sur 65 communes, ndlr] que la Marne est imperméable aux trafics en tous genres. Les axes traversants, comme l’autoroute A4, permettent de s’extraire rapidement ou de gagner l’Est parisien en à peine plus d’une heure.»

Ces derniers temps, des malfrats se sont spécialisés dans le vol de matériel agricole. Les GPS des tracteurs, sondant la composition des sols, sont particulièrement prisés : leur valeur peut atteindre 30 000 euros. Afin d’informer les céréaliers en temps réel, la gendarmerie a mis au point un service de SMS se déclenchant à chaque fois qu’une bande rôde alentours. A cela s’ajoute, comme ailleurs en France, l’application «tranquillité vacances» : les riverains y entrent leurs dates de départ et de retour, entre-temps les gendarmes gardent un œil particulièrement attentif.

«Gagner du temps».A quelques kilomètres, les militaires toquent chez un ébéniste. Il est absent mais une octogénaire bavarde apparaît. Thibault Liothier et Lauren Bas engagent la causette. La dame est inquiète de voir passer et repasser une camionnette blanche. L’année dernière, une femme la lui a faite à l’envers, en lui fourguant un calendrier de l’Avent pour 20 euros. La BTC note le signalement du véhicule suspect, rassure et promet des nouvelles.

Ici, la neige n’est pas rare l’hiver, et le facteur est souvent le seul visiteur pour les personnes à mobilité réduite. Pour elles, période électorale oblige, la BTC enregistre les procurations à domicile. L’imprimante portative édite les documents. «On pourrait croire qu’avec la faiblesse de nos effectifs, la BTC est un luxe. Or notre connaissance du terrain et les renseignements que l’on recueille font gagner beaucoup de temps à nos collègues», plaide Lydia Tadeous. Signe que l’initiative donne des résultats, le volume d’appels au 17 a sensiblement augmenté depuis la création de la BTC.

Willy Le Devin Envoyé spécial à Sainte-Menehould

Sourcewww.liberation.fr

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