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Gendarmerie du Lot. Il décroche la nationalité française et devient expert en cybersécurité

Né à Londres, Nicholas Scurfield a grandi entre deux cultures avant de réaliser son rêve : devenir gendarme en France. Installé dans le Lot, il nous confie son parcours incroyable

Nicholas Scurfield, gendarme à Cahors, spécialisé en cybercriminalité, en mission pour quelques semaines en Nouvelle Calédonie
Nicholas Scurfield, gendarme à Cahors, spécialisé en cybercriminalité, en mission pour quelques semaines en Nouvelle Calédonie ©N.S.

Par Jean-Claude Bonnemère

Publié le 14 mars 2025 à 19h18

Aujourd’hui installé à Cahors avec sa famille, il est un acteur clé de la lutte contre les cybermenaces et les nouvelles formes de criminalité. Expert en cybercriminalité, il conjugue passion pour son métier et épanouissement personnel dans le Lot. 

Originaire de la Grande-Bretagne, Nicholas Scurfield est né et a grandi à Londres, au sein d’une fratrie de trois garçons. Son père travaille dans une entreprise spécialisée en électronique et circuits imprimés, sa mère est employée au sein de la police londonienne. Mais tout d’un coup, changement de cap…

Une enfance entre deux cultures

À peine atteignait-il l’âge de 6 ans que ses parents décident de quitter l’Angleterre, pour s’installer en France. « C’était leur choix, ils voulaient nous offrir une vie meilleure que celle à laquelle il leur semblait pouvoir prétendre dans l’Angleterre de l’époque » relève Nicholas Scurfield. La famille opte pour le Sud-Ouest et jette son dévolu sur l’Ariège. C’était en 1989. Nicholas Scurfield et ses frères se retrouvent parachutés à l’école de Mirepoix. Premier défi : apprendre la langue. Autant pour les enfants cet apprentissage se révèle fulgurant, autant pour les parents plusieurs années n’y suffiront pas ! « Mes parents parlent encore très mal la langue, parce qu’ils n’ont pas eu cette chance de pouvoir aller à l’école en France » relève M. Scurfield.

Après une scolarité classique jusqu’en troisième, Nicholas se préoccupe d’entrer dans la gendarmerie ! Subjugué par le témoignage du père d’un de ses camarades venu présenter son métier alors qu’il était en classe de Primaire, il veut lui aussi devenir gendarme. « Pour moi, cet homme était un super-héros et en plus il nous avait emmenés visiter la brigade ! » insiste-t-il. Et il n’en démordra pas, quand bien même les contraintes auxquelles il va devoir se confronter auraient pu le contrarier. En effet, il doit préalablement franchir la barrière de la nationalité, qui n’est pas sans incidence financière. Lorsqu’on est étudiant, ces deux obstacles ne sont pas les moindres. Aussi s’oriente-t-il dans un premier temps vers des études qui le moment venu pourraient favoriser l’ouverture des portes de la gendarmerie. Dès la Seconde, il suit des cours en laboratoire, puis baccalauréat en poche, il poursuit par 6 années d’étude toujours en laboratoire jusqu’au BTS, en vue de devenir Technicien en Identification Criminelle, suivie d’une équivalence bac+2 en informatique. De là, il bifurque en Master agro-alimentaire, en attendant la nationalité française… alors qu’il est prêt à entrer dans la vie professionnelle. Pour une question d’argent et de paperasserie administrative, la gendarmerie lui reste encore inaccessible.

Un rêve de gendarmerie plus fort que tout

Nicholas Scurfield parachève ses études par un master en agroalimentaire en intégrant l’école d’ingénieur de Purpan, à Toulouse. C’est à ce moment-là qu’il décroche le précieux sésame de la naturalisation française. En même temps, il est embauché par l’entreprise auprès de laquelle il effectuait un stage. Débutant au bas de l’échelle, il se retrouve très vite chef de service, à la tête d’une centaine de personnes. De fil en aiguille, il exerce des responsabilités dans plusieurs entreprises, et visiblement s’ouvre à lui un bel avenir professionnel. Pour autant, la perspective de la gendarmerie ne le quitte pas. Il envisage de devenir réserviste. « Mais mon patron n’avait pas envie que je perde du temps avec ça », se souvient-il. Il poursuit dans le privé, une expérience bonne à prendre, quelle que soit la suite… Il devient enseignant en anglais dans un lycée de Carcassonne, puis assistant d’éducation à Narbonne, cherchant à se dégager du temps pour faire son entrée chez les réservistes de la gendarmerie. « Cette affectation confirme mon idée première, c’est bien la gendarmerie qui m’intéresse par-dessus tout ! » relève-t-il.

En 2014, il est reçu haut la main au concours d’entrée dans la gendarmerie et intègre l’école de Montluçon. Il a enfin atteint le but qui avait motivé ses études. Il se voit propulsé à la présidence de la 2e compagnie. Son premier poste le conduit à la brigade de Thoissey, dans le département de l’Ain, où il restera jusqu’en 2021. En tant que brigadier, sa vie professionnelle est rythmée par les patrouilles, les enquêtes, la police de la route… Là, il exerce le métier de base de la gendarmerie, le cœur de métier de gendarme, c’est-à-dire celui que côtoient sur le terrain tous les citoyens. « Ceci m’a beaucoup intéressé, au point que je n’étais pas pressé pour changer d’affectation » concède-t-il. Néanmoins, il répond à d’amicales pressions qui l’incitent à passer le diplôme des systèmes d’information et de communication de la gendarmerie.

Une carrière entre terrain et nouvelles technologies

Nouveau succès à l’issue de 2 ans de formation, lui conférant la spécialité qu’il occupe actuellement au sein du service informatique. Changement radical de métier : au revoir les procédures judiciaires et bienvenue sur la planète informatique. Ordinateur, téléphone portable, réseau radio, n’ont plus de secret pour lui, avec les nouvelles casquettes qui sont celles de la lutte contre les cyber menaces, la cybercriminalité, le drone, la lutte anti-drone…

2 021 est également l’année où Nicholas arrive à Cahors avec son épouse et leurs deux enfants. Maréchal des logis chef, il devrait se retrouver adjudant au printemps prochain, affecté donc à la section opérationnelle de lutte contre les cyber menaces. Son champ d’intervention s’étire sur tout le département du Lot où il est question de maintenir en condition opérationnelle la totalité des infrastructures d’information et de communication ; ordinateurs, informatique, téléphonie fixe, téléphonie mobile, et autres communications radio spécifiques à la gendarmerie. Ses compétences le conduisent sur des missions au niveau national et même international. Ainsi pour les Jeux olympiques à Paris, Nicholas a mené des missions de lutte anti-drone ou de télé pilote de drone. À l’international, il a été chargé de mission au Qatar pour la Coupe du Monde de 2022, en tant qu’opérateur de lutte anti-drone. La France avait en charge la sécurisation des sites d’entraînement et de compétition ainsi que les hôtels où étaient logés des sportifs du monde entier.

Conjuguer esprit de famille et passion informatique

Résidant à Cahors, il bénéficie d’une situation inédite : toute la famille en entier, vit sur les mêmes lieux. Son épouse est Conseillère Principale d’Education dans un établissement cadurcien, leurs enfants sont scolarisés à deux pas de la maison. Nicholas l’affirme sans ambages : « Ici, je m’épanouis à la fois dans mon métier et dans ma vie tout entière ». Jetant un œil par la fenêtre de son bureau, il s’exclame : « Regardez les collines, les combes en face, cela, je pense que je n’aurais pas pu l’avoir dans aucun autre département ». Côté loisirs, lorsque cela est possible Nicholas pratique le badminton, si ce n’est la marche ou le vélo.

À présent et pour 3 mois, il est détaché pour une mission en Nouvelle-Calédonie, pour apporter de l’assistance à ses collègues en matière informatique, pour tous les outils d’information et de communication auprès de l’ensemble des brigades.

« Oui, j’ai atteint mon objectif, j’ai réussi tout ce que je voulais faire, je suis là où je veux être, alliant ma passion pour la technicité de mon métier et ma vie de famille », souligne-t-il. Certes, Nicholas est amené à se déplacer, à s’éloigner de sa famille, en fonction des impératifs de service. « Heureusement, j’ai une femme qui est vraiment super pour veiller au bon fonctionnement de la cellule familiale en mon absence », tempère-t-il. Il n’hésite pas à manifester sa reconnaissance à son épouse, « parce que sans elle, je n’aurais jamais pu vivre les rêves que je vis ». Il souligne les milliers de facettes qu’offre l’engagement dans la gendarmerie, avec des formations en permanence, de possibles réorientations au gré de ses envies de carrière.

Nicholas en est persuadé, il ajoute : « Je suis un échantillon parmi tout ce que représente la gendarmerie, nombreux sont ceux qui diraient la même chose… »

« J’ai atteint mon objectif, j’ai réussi tout ce que je voulais faire… »

Et l’Angleterre dans tout cela ? « J’y retourne voir la famille autant que possible. Mais je suis établi en France, je suis en couple avec une Française, j’ai des enfants Français, je connais bien mieux la France maintenant que l’Angleterre » constate-t-il.

Nicholas n’est pas un inconnu à Cahors et le Lot, où il a déjà dispensé des formations en cybercriminalité au niveau des collèges et des lycées, sur le harcèlement scolaire via internet. Il est également intervenu auprès des services des impôts, dans les hôpitaux de Cahors, Figeac et Gourdon, auprès d’associations… « À travers ce métier qui m’oblige à me renouveler sans cesse en fonction de l’évolution de la société et des avancées de l’informatique, je me dois d’être toujours à la pointe des connaissances » nous confie-t-il. Ces interventions lui permettent de mesurer à quel point les gens ont besoin de sensibilisation sur les dangers d’internet, pour les jeunes qui ont tous un téléphone portable et un ordinateur et qui parfois se mettent en danger parce qu’ils n’ont pas les connaissances. Auprès de tous, il explique les règles d’utilisation afin que chacun puisse éviter les dérives. 

Nicholas Scurfield jongle entre sa passion pour la tech, son engagement dans la lutte contre la cybercriminalité et la transmission de ses connaissances, sans oublier ce qui prime à ses yeux par dessus tout le reste : la famille !

Source : actu.fr