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Le - Une séance de tir avec les gendarmes de la compagnie de Mortagne-au-Perche

Mortagne-au-Perche

On a testé une séance de tir avec les gendarmes de la compagnie de Mortagne-au-Perche

Les gendarmes de la compagnie de Mortagne-au-Perche (Orne) sont régulièrement formés au tir, au stand de Mamers (72).

Les premières cartouches sont tirées à 25 mètres des cibles.
Les premières cartouches sont tirées à 25 mètres des cibles. (©Le Perche)

Par Emilie Jouvin

Publié le 24 Sep 21 à 8:32

Jeudi 9 septembre 2021, 11 h. Devant le stand de tir de Mamers (Sarthe), situé à l’escadron de gendarmerie mobile, se succèdent les militaires de la compagnie de Mortagne-au-Perche (Orne).

Ils viennent se former au tir, encadrés par le capitaine Olivier Delaitre, commandant de la compagnie en second et moniteur d’intervention professionnelle (MIP).

Nous avons été conviés à assister à l’une des séances, et découvert une forme d’entraînement à laquelle nous ne nous attendions pas…

« S’adapter aux agressions »

Ici, pas de gendarmes alignés sur le pas de tir face à une rangée de cibles. « Ça, c’était il y a 15 ans. »

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Aujourd’hui, les militaires sont deux par session (ils seront 18 à passer dans la journée), et soumis à un exercice se voulant « au plus près de la réalité », explique le capitaine Delaitre.

L’enjeu est de s’adapter aux agressions auxquelles nous sommes confrontées. Le niveau d’agressivité a grimpé, les armes sortent plus facilement en direction des forces de l’ordre, notamment lors de violences intrafamiliales. Olivier DelaitreMoniteur d’intervention professionelle

Pour la session, chaque participant est muni de deux armes : un pistolet semi-automatique (l’arme individuelle dont les gendarmes disposent au quotidien), et une arme longue automatique – le HK UMP9 – arme collective affectée à chaque unité.

Une fois équipé, le duo va avoir à faire à un cas pratique, et agir vite, après un appel simulé du CORG (Centre d’opérations et de renseignement de la gendarmerie). C’est le directeur de tir, qui énonce le scénario du jour, dans le sas menant à la salle d’entraînement.

Les militaires doivent progresser tout en se protégeant.
Les militaires doivent progresser tout en se protégeant. (©Le Perche)

« Un homme a fait feu à son domicile, une longère située dans la campagne du Pays de L’Aigle. Un OPJ – Officier de police judiciaire – passait à proximité et s’est rendu sur place. Depuis, des coups de feu ont à nouveau été entendus et nous n’avons plus de nouvelles de lui. Nous savons aussi qu’il y a un enfant dans la maison. »

L’objectif est clair : mettre hors de danger l’enfant, venir en aide à l’OPJ et neutraliser le forcené.

À peine les consignes détaillées, le duo se met en position et approche l’entrée du stand de tir, faisant ce jour office de longère théâtre d’un drame intrafamilial.

70 cartouches à tirer

Prudemment, et sans jamais cesser de communiquer grâce à la radio dont il est doté, le binôme pénètre dans la salle… plongée dans l’obscurité ! « 90 % des tirs de gendarmerie ont lieu de nuit », nous informe le capitaine, près de qui nous resterons tout au long de l’exercice.

Les militaires doivent progresser tout en se protégeant.
Les militaires doivent progresser tout en se protégeant. (©Avec le pistolet semi-automatique.)

Casque sur la tête, lunettes sur les yeux et chasuble sur les épaules, nous devons impérativement respecter cette consigne afin de ne JAMAIS nous retrouver devant les militaires faisant feu, car il est bien question de balles réelles, d’un calibre de 9 mm.

Les premières cartouches sont tirées à 25 mètres des cibles (deux cibles pour chaque militaire, représentées par un soldat et un civil), avec l’arme d’épaule. Le directeur de tir observe chacun des mouvements, et dispense quelques instructions. La salle, complètement insonorisée, est couverte de bois (murs et plafond), et de tartan au sol.

« Un usage exceptionnel »

Avant de passer à la pratique, les gendarmes se voient dispenser un peu de théorie. « Nous rappelons le cadre légal de l’usage d’une arme », indique le capitaine Olivier Delaitre. « Celle-ci ne peut être utilisée que dans des cas bien précis, comme la légitime défense, ou bien la nécessité de stopper un individu venant de commettre un délit flagrant. »

Dans les faits, les militaires ont très peu recours aux armes. Au sein de la compagnie de Mortagne-au-Perche, le dernier tir date de trois ans, et avait permis de neutraliser un chien. Dans sa carrière, le capitaine Delaitre confie « avoir à plusieurs reprises » sorti son arme, mais il n’a jamais eu à tirer. « Mais il faut tout de même avoir à l’esprit qu’une agression nécessitant l’usage de l’arme peut se produire n’importe quand et n’importe où, y compris dans nos campagnes éloignées des villes. »

A noter également que l’arme à feu est beaucoup moins utilisée depuis l’arrivée du Taser, arme de force intermédiaire servant en moyenne quatre fois par an, sur le territoire de la compagnie.

Nous aussi on a testé et visé (presque) « dans le mille » !
Nous aussi on a testé et visé (presque) « dans le mille » ! (©Le Perche)

En progressant, les militaires se protègent derrière des blocs disposés ici et là. L’idée est d’enchaîner les déplacements, varier les positions dans la pénombre, tout en continuant d’utiliser sa radio. Et liquider les 70 cartouches présentes dans les chargeurs. « Cela s’apparente à des conditions extrêmes. Les militaires se prêtant à cet exercice ont déjà un bon niveau », renseigne le directeur de tir.

Deux cibles à atteindre pour chacun des gendarmes.
Deux cibles à atteindre pour chacun des gendarmes. (©Le Perche)

Pour ajouter une touche de réalisme, le gyrophare bleu tourne dans l’obscurité, et une bande-son diffuse cris et détonations. L’odeur de poudre commence à flotter, malgré l’extraction de l’air.

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Sur le parcours, un premier mannequin jonche au sol. C’est l’OPJ, décédé. Un deuxième mannequin est à trouver à sept mètres des cibles. Il s’agit de l’enfant à sauver. Le binôme décroche parfois, mais parvient au but. Puis se retire par paliers, comme il est arrivé.

Exercice apprécié

Après 140 tirs enchaînés, fin de l’exercice pour le binôme. On rallume les lumières et on peut souffler. La surprise était totale pour nous, et l’expérience instructive. Comme elle l’est, à chaque fois, pour les militaires inscrits. « Ce genre d’entraînement est très apprécié, c’est un cas concret, et donc utile », résume le capitaine Delaitre qui prend du plaisir à former les troupes. « Le tout se déroule dans la bonne humeur, on est là pour permettre aux militaires d’appréhender sereinement l’usage des armes entre camarades. »

Au moins deux séances comme celle-ci sont suivies par les 120 gendarmes de la compagnie de Mortagne-au-Perche chaque année, afin de maintenir les acquis et progresser.

Source : actu.fr

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