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Immigration : En mer, des gendarmes face au périlleux rêve d’Angleterre des migrants

DANGER Les tentatives de traversées sur de frêles embarcations se sont intensifiées cet été, après s’être envolées à partir de fin 2018.20 Minutes avec AFP

Publié le 15/08/21 à 10h11 — Mis à jour le 15/08/21 à 10h11

Des gendarmes de Boulogne-Sur-Mer cherchent des migrants sur des embarcations de fortune pour les secourir pendant la traversée de la Manche. — AFP

« De toute façon, ils partiront » : sur une vedette longeant la Côte d’Opale, des gendarmes scrutent terre et mer à la recherche de migrants. Avec la certitude que ceux empêchés de partir ou secourus en mer retenteront la dangereuse traversée vers l’ Angleterre.

Ce jeudi d’août à l’aube, quatre gendarmes embarquent sur l’Eulimène, vedette de la brigade nautique de la gendarmerie nationale de Calais, dans le port de Boulogne-sur-Mer.

Mission de surveillance et de sauvetage

Depuis un an, ces gendarmes « terrestres » mènent des missions de surveillance, de renseignement mais aussi de sauvetage, dans la bande de 300 mètres longeant la Côte d’Opale.

Face au verrouillage des accès aux ferries et à l’Eurotunnel, les tentatives de traversées sur de frêles embarcations se sont encore intensifiées cet été, après s’être envolées à partir de fin 2018.

Selon le ministère britannique de l’Intérieur, jeudi a marqué un nouveau record, avec 592 migrants secourus ou interceptés côté anglais, portant à 11.000 le nombre de ceux ayant ainsi atteint l’Angleterre en 2021, d’après le décompte de l’agence de presse PA.

« Ça part de partout ce matin », constate le capitaine Laurent Martin de Morestel, commandant en second de la compagnie. La mer est calme, propice aux traversées du détroit du Pas-de-Calais. En son point le plus étroit, les falaises de Douvres ne sont qu’à 28 km.

« Détresse »

Le téléphone portable du capitaine sonne. Sur la plage d’Hardelot, des gendarmes viennent d’empêcher 56 migrants, dont des enfants, d’embarquer sur une barge de 12 m. « On a vu des gens avec des paddles, des piscines gonflables, qui ramaient avec des pelles, des balais », rapporte le capitaine, tandis que la vedette longe la côte à petite vitesse.

« Sur terre, on fait de la lutte contre l’immigration clandestine, mais dès qu’il y a un centimètre d’eau, on n’en fait plus », explique-t-il. « Aucune de nos administrations en mer ne fait de lutte contre l’immigration clandestine, seulement du sauvetage », confirme la préfecture maritime.

Courants violents, trafic maritime intense, bateaux surchargés, sous-motorisés… le danger est réel.

Jeudi matin, un jeune homme africain a trouvé la mort dans le naufrage de son canot, au large de Dunkerque.

Le prix moyen de la traversée se situe entre 2.000 à 3.000 euros, selon les gendarmes et le Centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage (CROSS) Gris-Nez. « Voir la détresse des gens, ça reste compliqué. Pour eux, c’est difficile de monter sur notre bateau pour retourner » côté français, confie le brigadier Simon D’Hont.

« Personne n’a la solution »

« Tant que le danger n’est pas avéré, on les accompagne pour éviter l’accident et lorsque l’on arrive dans les eaux britanniques, les secours britanniques les prennent en charge », résume le capitaine. De toute manière, « ils repartiront », « personne n’a la solution ».

Les autorités britanniques viennent de hausser le ton, le secrétaire d’Etat à l’immigration qualifiant le nombre des traversées de « totalement inacceptable ». Le ministre français de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a récemment évoqué une implication de Frontex.

Le Royaume-Uni, qui s’est engagé fin juillet à payer 62,7 millions d’euros en 2021-2022 pour renforcer les forces de l’ordre françaises sur les côtes, finance deux nouveaux bateaux pour la brigade nautique, attendus en octobre.

« On a 80 km de côtes continues (…) donc je ne vois pas comment on pourrait empêcher » les passages, pointe le militant Loan Torondel, auteur d’un rapport sur les traversées de la Manche. Il se « désole de voir des dizaines de millions d’euros dépensés pour cette stratégie au détriment de la recherche d’alternatives ».

De 60 à 70 % des tentatives de traversées des migrants réussissent, selon François Guennoc, de l’association l’Auberge des migrants, un bateau sur deux selon le CROSS.

Même surveillé 24h sur 24 par « un gendarme tous les 2km a minima », le littoral est « difficile à tenir », reconnaît le capitaine, qui tente depuis la mer « d’anticiper le coup sur lequel vont se positionner les réseaux de passeurs ».

Des passeurs qui s’adaptent aussi en permanence : ils ont ainsi troqué la dissimulation des canots dans les dunes contre la « dépose-minute » des embarcations et migrants directement sur le rivage.

Source : www.20minutes.fr

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