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Le - Intervention au Sénat du général Denis FAVIER, directeur général de la gendarmerie nationale

Intervention au Sénat du général Denis FAVIER, directeur général de la gendarmerie nationale

Le directeur de la gendarmerie nationale est intervenu devant la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat.

senatsenatLoi de finances pour 2014 – Audition du Général Denis Favier, directeur général de la Gendarmerie nationale – programme 152 «Gendarmerie» de la mission Sécurité

La commission auditionne le général Denis Favier, directeur général de la Gendarmerie nationale, sur le projet de loi de finances pour 2014 (programme 152 « Gendarmerie » de la mission Sécurité).

M. Daniel Reinerprésident – Mon général, c’est avec un grand plaisir que nous vous accueillons devant notre commission, pour vous entendre sur les crédits du projet de loi de finances. Je rappelle qu’après Saint-Cyr vous avez effectué toute votre carrière au sein de la Gendarmerie nationale. Vous avez assumé différentes fonctions tant en Gendarmerie départementale que mobile ainsi qu’en administration centrale. Vous avez également été à la tête du GIGN. Par la suite vous avez occupé le poste de commandant de la région de Gendarmerie d’Ile-de-France avant de rejoindre en qualité de conseiller Gendarmerie le cabinet du ministre de l’intérieur.

Enfin, vous avez été nommé directeur général de la Gendarmerie nationale, en avril 2013.

Nous sommes donc très heureux de vous entendre sur le budget de la Gendarmerie nationale dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014. Où en sommes-nous de l’augmentation des effectifs de la Gendarmerie ? Qu’en est-il des fortes contraintes qui pèsent sur les crédits de fonctionnement ? Quelles sont les perspectives s’agissant de l’immobilier, et de l’état de certaines casernes domaniales, qui pèsent sur le moral des gendarmes et de leur famille ? Enfin, où en sommes-nous concernant le renouvellement des équipements lourds de la Gendarmerie comme les hélicoptères ou les véhicules blindés à roue de la Gendarmerie mobile et qu’en est-il des gendarmes déployés en OPEX ? Mon général, vous avez la parole.

Général Denis Favier, directeur général de la Gendarmerie nationale – Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les sénateurs, je veux avant tout vous dire l’importance que revêt pour moi cette audition. J’ai été nommé directeur général de la gendarmerie nationale il y a 6 mois et ce premier rendez-vous devant les sénateurs est une étape importante. C’est l’occasion de dresser le bilan et de dessiner les perspectives de la Gendarmerie nationale.

Depuis plusieurs années, la Gendarmerie connaît une profonde mutation, pourtant elle a préservé des acquis essentiels : ses valeurs de cohésion et d’esprit de corps, ses valeurs d’engagement et de dévouement et de sens de la mission, et, enfin, sa proximité avec la population, que je souhaite toutefois encore renforcer.

Mais si elle a su préserver ce qui fait son essence, la Gendarmerie présente des fragilités qu’il faut mesurer avec lucidité. Elle sort de dix ans de réformes denses et ininterrompues, comme peu d’institutions publiques en ont connu. À l’objectif, légitime, d’amélioration de la performance s’est greffé l’impératif de réduction des dépenses. Cet exercice a ses limites et la Gendarmerie a atteint un seuil.

Ainsi en matière de personnel, elle a été malmenée par la RGPP, avec une baisse de 6 700 effectifs entre 2008 et 2012. Cette diminution des effectifs a eu des conséquences importantes notamment sur les brigades territoriales et sur la gendarmerie mobile, avec la dissolution des escadrons, dont nous mesurons les effets aujourd’hui. La tendance a été inversée, avec 192 ETPT supplémentaires en 2013, et désormais 162 postes supplémentaires prévus en 2014, qui se répartissent aux deux-tiers par des sous-officiers de gendarmerie et pour un tiers par des gendarmes adjoints volontaires. Pour ce qui concerne les moyens, sa capacité à renouveler ses équipements a été réduite de moitié depuis 2007, passant de 570 millions d’euros en crédits de paiement en 2007 à 249 millions d’euros en crédits de paiement en 2012 ce qui explique mes difficultés en matière de politique d’investissement.

Un écart se crée, aujourd’hui, entre des attentes toujours plus fortes en matière de sécurité et un budget sous tension. Nos difficultés sont amplifiées par les divers « gels » et « surgels » en cours d’année. La gestion 2013 est, en cela, emblématique. Entre la mise en réserve et le « surgel » de début d’année, les crédits du programme 152 ont été réduits de 34 millions d’euros sur le titre 2 (dépenses de personnel) et de plus de 90 millions d’euros sur le hors titre 2. La loi de finances de 2013 garantissait des moyens calculés au plus juste, mais elle permettait de faire face. Sans la réserve, le fonctionnement et les investissements sont sous tension.

Nous connaissons des « années blanches », aucune commande de véhicules passée, pour le moment, en 2013, aucune commande non plus d’ordinateurs, pour la deuxième année consécutive. Nous sommes en difficulté pour assurer les paiements sur des lignes incontournables, par exemple les dépenses d’énergie (chauffage ou électricité par exemple).

Toutes les forces sont mobilisées pour obtenir le dégel des crédits, y compris au niveau du ministre. Et même si elle ne réglera pas tout, la levée de la mise en réserve est indispensable et urgente. Dans le cas contraire, les investissements seront abandonnés et nous ne pourrions, non plus, honorer nos dépenses incontournables de fin d’année. Les factures impayées induiraient un report de charge de 21 millions d’euros sur 2014, que le budget prévu n’est pas en capacité d’absorber.

Par ailleurs, afin de respecter mon enveloppe de crédits hors titre 2 en 2013, la dotation en carburant dans les régions a globalement été contrainte, en prenant des dispositions en début d’année pour respecter cette enveloppe. Au final, la dépense sera en moyenne inférieure de 6% à l’enveloppe initiale. Cela entraîne des conséquences sur l’activité opérationnelle, puisque le véhicule est l’instrument de base du gendarme. A la différence des armées, et en dehors de quelques équipements spécifiques, comme les hélicoptères ou les véhicules blindés à roue, nous n’avons pas d’équipements lourds, mais des équipements, comme les véhicules, qui servent quotidiennement aux unités.

S’agissant des impératifs budgétaires pour 2014, l’action de la Gendarmerie s’insère dans un cadre exigeant où les objectifs ambitieux en matière de sécurité doivent être conciliés avec les impératifs de sérieux en matière budgétaire.

Dans ce cadre, la Gendarmerie serait dotée d’un budget 2014 responsable et cohérent. C’est un budget responsable car il s’inscrit dans l’objectif de maîtrise des dépenses. C’est un budget cohérent avec mes missions. Même si nous faisons partie des « programmes prioritaires », les efforts à produire se traduisent de manière concrète et me conduisent, en tant que responsable de programme, à fixer des priorités.

En matière de ressources humaines, ce budget permet de concrétiser la priorité gouvernementale de création de 162 postes. Le budget du titre 2 est de 6,820 milliards d’euros, dont 3,706 milliards d’euros hors compte d’affectation spéciale (CAS) pensions et 3,114 milliards d’euros pour le CAS pensions. Des mesures catégorielles sont également prévues pour valoriser la condition du personnel, notamment la poursuite de la mise en oeuvre de la catégorie B.

De son côté, la dotation prévue sur le hors titre 2 s’élève à 1,138 milliard d’euros en autorisations d’engagement et 1,213 milliard d’euros en crédits de paiement, en hausse de 1% en euros courants. Au sein de ce hors titre 2, le budget de fonctionnement restera globalement identique à 2013 (949 millions d’euros contre 950 millions d’euros en 2013). Cela signifie que l’inflation et les hausses inévitables, comme celle des loyers, seront prises sous plafond, par redéploiement des crédits. La tension persistera donc. Certaines dépenses comme les déplacements, le carburant ou l’entretien des véhicules devront être ajustées pour garantir le règlement de nos engagements contractuels.

Les investissements prioritaires seront préservés – avec 190 millions d’euros en autorisations d’engagement et 265 millions d’euros en crédits de paiement – sans, pour autant, être en mesure de rattraper le retard pris ces dernières années. Ainsi en matière de mobilité, le vieillissement du parc pèse sur la disponibilité des véhicules. Les 40 millions d’euros en autorisations d’engagement permettraient de commander environ 2 000 véhicules d’intervention, pour un parc total de 27 500. Dans le domaine des systèmes d’information et de communication, les investissements ont déjà été plusieurs fois retardés, nous contraignant à prolonger des matériels obsolètes. Ainsi, le renouvellement des ordinateurs est devenu indispensable. Environ 8 millions d’euros en autorisations d’engagement y seront consacrés, pour 10 000 ordinateurs. Quant à l’immobilier, condition du maillage territorial et lié à la disponibilité des gendarmes, il sort d’une année blanche. 9 millions d’euros en autorisations d’engagement sont prévus pour des opérations de maintenance urgentes dans les casernes domaniales, pour faire face à des situations de rupture très préoccupantes. De même, 6 millions d’euros en autorisations d’engagement doivent permettre de relancer la construction de quelques casernes locatives, au travers des subventions aux collectivités territoriales. Pour autant, cela reste en deçà de nos besoins réels et nous avons de réelles préoccupations concernant l’état de certaines casernes domaniales.

Vous le constatez, ce budget est construit au plus juste. Géré rigoureusement, il devrait permettre de faire face à nos besoins.

C’est le cadre de gestion qui créera des contraintes fortes. Ainsi, la mise en réserve viendra, dès le début d’année, réduire nos ressources. Sur la base d’un taux de 7%, elle atteindrait 85 millions d’euros en crédits de paiement sur le hors titre 2, bien loin du budget voté par le Parlement.

Si j’insiste sur ce point, c’est pour rappeler que la gestion que nous vivons reste éloignée de la loi de finances que vous votez. Je ne remets pas en cause le principe de mise en réserve, ni même de « surgel ». Ce mode de fonctionnement est assez sain et prudent. Ce qui est gênant, c’est que le taux de mise en réserve soit passé, en quelques années, de 5 à 7%, voire 8 ou 9 % avec les « surgels ». Ce qui est gênant également, c’est que le dégel de ces crédits en cours d’année est devenu aléatoire.

Et quand, après de nombreux efforts, ils sont accordés, ils le sont en toute fin de gestion, trop tard pour être utilisés convenablement, car il faut souvent les engager en urgence.Au bout du compte, les responsables de programme perdent l’essentiel de leur initiative. Ils n’ont pas de visibilité, anticipent donc peu et finalement dépensent en fin d’année ce qui leur est rendu, mais dans l’urgence. Je ne suis pas sûr que tout cela soit gage de bonne administration.

J’en viens maintenant aux objectifs opérationnels, aux visions et priorités pour 2014.

Avec ces ressources, nous mettrons résolument en application une politique de sécurité solide. Le ministre de l’intérieur a présenté, le 30 septembre dernier, les trois grands projets qui vont structurer notre action.

D’abord, une meilleure organisation des missions de sécurité. Ensuite, la valorisation du potentiel humain au sein des forces de l’ordre. Enfin, la définition et la préparation d’une « sécurité 3.0 » à l’ère du numérique et des nouvelles technologies.

Dans ce contexte j’ai, pour 2014, une ambition : promouvoir une Gendarmerie dynamique et humaine, en réaffirmant le sens de l’engagement de son personnel et en la recentrant sur le service public de sécurité.

Pour cela, je veux tout d’abord poursuivre notre modernisation. Cette modernisation s’inscrit dans une feuille de route, appliquée avec détermination depuis juin 2013, partagée par le personnel et avec le plein appui du ministre. Il s’agit d’une démarche qui s’inscrit totalement dans la modernisation de l’action publique.

L’objectif essentiel est de dégager, pour tous les gendarmes quel que soit leur niveau de responsabilité, du temps, de l’initiative et de la liberté d’action et d’insuffler, à tous les échelons de l’institution, un état d’esprit valorisant l’initiative et l’innovation. Il y aussi, derrière, l’objectif de la meilleure utilisation possible des ressources, au travers de l’emploi optimal des moyens disponibles et du temps des gendarmes.

Au-delà d’un travail sur nos « process » et nos méthodes, nous conduirons des actions porteuses de sens. Ainsi, l’adaptation de notre outil opérationnel, déjà bien engagée, sera poursuivie avec résolution en 2014. L’achèvement de la réforme régionale viendra rationaliser nos structures de commandement en regroupant, dans les 15 régions non-zonales, les états-majors de la région et du département chef-lieu, sous l’autorité d’un seul chef qui cumulera la responsabilité des deux niveaux. L’adaptation – au cas par cas – de la cartographie de nos unités territoriales pour répondre aux évolutions de la démographie, des flux et de la délinquance. L’ajustement des zones de compétence entre la Gendarmerie et la police se poursuivra, là encore au cas par cas et en fonction des réalités locales.

L’amélioration de nos synergies avec la police se traduira par des initiatives communes : le rapprochement de la criminalistique dans certains départements, l’emploi des moyens rares – cynophiles, aériens… En 2014, nous accompagnerons aussi la création de la nouvelle structure de renseignement territorial, notamment par une réorganisation, en profondeur, de notre propre chaîne de renseignement et de conduite des opérations.

Parmi les diverses manifestations de l’insécurité, la lutte contre les cambriolages, dans le prolongement du plan annoncé par le ministre le 25 septembre, sera une des priorités.

Nous garderons enfin pour objectif d’entretenir un contact étroit et renforcé avec les élus et la population, d’expliquer notre action, et de rendre des comptes sur la qualité du service rendu. Là réside un puissant levier de confiance, notamment pour battre en brèche le sentiment d’insécurité.

Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les sénateurs, je vous remercie de votre attention et je suis prêt, maintenant, à répondre à vos questions.

M. Michel Boutant, co-rapporteur pour avis. – La situation est tendue, nous le vérifions sur le terrain au quotidien. 2013 a été une année blanche, sans renouvellement de matériel. Sur le terrain, les vieux véhicules sont cannibalisés pour pouvoir trouver les pièces nécessaires !

Dans de nombreuses casernes domaniales, comme à Satory par exemple, comme nous avons pu le constater lors d’une visite avec notre collègue Gérard Larcher, mais aussi à Melun, les logements affectés aux gendarmes sont dans un état lamentable. Il n’y a pas eu d’investissement en 2013 pour remédier à ce problème, mais 9 millions sont inscrits au budget 2014, et 6 millions pour la construction de nouvelles casernes locatives.

Concernant le montant des loyers, leur baisse peut constituer une difficulté pour les collectivités, qui ont souscrit des emprunts et calculé le montant des loyers pour qu’il couvre leurs annuités. Et tous les types de collectivités sont concernés.

S’agissant de la réserve opérationnelle de la Gendarmerie, le budget a baissé de 5 millions d’euros. Or, leur rôle sur le terrain est extrêmement important, c’est même l’exemple le plus abouti en matière de réserves ! Quelle sera son activité à l’avenir ?

Je voudrais également revenir sur la surveillance des centrales nucléaires par la gendarmerie nationale. Si des membres pacifistes d’organisations non gouvernementales signalent la faiblesse de la surveillance et parviennent à s’y introduire, alors quid des personnes malintentionnées ?

Enfin, pourriez-vous faire un état des lieux du rapprochement entre police et Gendarmerie ?

M. Gérard Larcher, co-rapporteur pour avis. – On constate une accélération des gels et surgels, le budget que nous votons n’est que théorique ! En cours d’année, il faudra geler les dépenses. Le parc de véhicules ne pourra être renouvelé entièrement qu’en plus de 13 années, à la vitesse de l’année 2014, or c’est une nécessité car c’est un vecteur de la présence territoriale !

Quid des moyens aériens et du renouvellement du parc d’hélicoptères avec le remplacement des hélicoptères mono-turbines par de nouveaux modèles ? À quelle échéance ?

Quid des véhicules blindés, de leur rôle et de leur place ?

S’agissant des casernes domaniales, le ministre de l’intérieur M. Manuel Valls a reconnu qu’il faudrait 100 millions d’euros par an dédiés à ce sujet. Prévoyez-vous une programmation pluriannuelle ?

Les moyens dédiés aux OPEX sont au même niveau que l’an dernier, pourriez-vous rappeler le rôle des gendarmes qui sont en OPEX aujourd’hui ?

Concernant le carburant, il n’y a plus, aujourd’hui, de quête auprès des collectivités territoriales, néanmoins la tentation est parfois là. On constate un mode de traitement différent entre les secteurs police et Gendarmerie !

Lors de la discussion de la loi Duflot sur le logement social, je suis intervenu pour que les moyens immobiliers de la Gendarmerie ne soient pas vendus de façon symbolique, car une partie des recettes doit être affectée à l’amélioration de l’immobilier domanial.

Enfin, soyons assurés que nous, les représentants de la nation, sommes attentifs aux hommes et femmes qui servent dans la Gendarmerie !

Général Denis Favier – J’ai une vision optimiste de la place de la Gendarmerie dans l’appareil de sécurité national, notamment lorsque je vais sur le terrain à la rencontre des hommes et femmes qui servent au sein de l’institution, parfois dans des situations très difficiles, comme en Guyane. Je suis néanmoins inquiet sur l’exécution budgétaire. La question centrale est celle du paiement de factures d’énergie sans levée de mise en réserve. Afin de régler ces dépenses, je suis aujourd’hui contraint de reporter le paiement de loyers dus aux collectivités.

Les crédits dédiés à l’immobilier domanial en 2014 seront de 9 millions d’euros, cela permettra uniquement de faire face aux travaux urgents, alors qu’un budget de 100 millions d’euros par an serait nécessaire pour l’entretien de l’immobilier domanial. C’est un sujet sensible, les logements domaniaux ne répondent souvent pas aux normes élémentaires de confort moderne. Vous connaissez les principaux points noirs, comme Satory, Melun, Aubervilliers ou d’autres encore. Or, le logement, qui répond à une nécessité de service et qui est une condition du maillage territorial, a un effet direct sur le moral des personnels et de leur famille.

La réserve opérationnelle est un élément essentiel. Toutefois, nous sommes contingentés. 40 millions étaient consacrés à la réserve en 2013, 35 millions sont provisionnés en 2014. Aujourd’hui, environ 26 000 réservistes travaillent en moyenne 21 jours par an au profit de la Gendarmerie, l’an prochain ils feront donc moins de jours. Les réservistes sont un lien fort entre les forces de l’ordre et la Nation, il convient de ne pas remettre en cause ce lien.

S’agissant de la surveillance des centrales nucléaires, nous avons conclu un partenariat avec EDF afin de créer des pelotons spéciaux (PSPG) dédiés à la centrale sur financement d’EDF ; c’est un partenariat très novateur. Dans ce domaine, notre priorité va à la protection des éléments sensibles de la centrale. Les problèmes récents soulèvent en fait la qualification pénale en cas d’intrusion ou de survol d’une centrale. Actuellement, l’intrusion dans une centrale est réprimée sur la base de la violation de domicile, avec une peine assez légère. Un travail est engagé actuellement en interministériel afin d’étudier un renforcement des sanctions pénales pour ce type d’infraction.

M. Michel Boutant– Ce pourrait être dissuasif pour les mouvements associatifs, mais quid des personnes malintentionnées ?

M. Daniel Reiner, président. – La LPM renforce les incriminations pénales en cas d’intrusion dans des ports. Le cas des centrales nucléaires n’est pas prévu.

Général Favier – Ces installations sont civiles, donc n’entrent pas dans le cadre de la LPM. Néanmoins, le travail se fait sous l’égide du SGDSN.

Le rapprochement entre police et Gendarmerie a déjà plusieurs années. Nous avons trouvé nos marques. Le mouvement est irréversible, notre position est reconnue et nous sommes pleinement associés à la politique de sécurité. On peut encore aller plus loin dans la mutualisation des moyens, au cas par cas et avec une étude d’impact précise et complète ; cela concerne par exemple les moyens cynophiles, scientifiques, aériens … Nous suivons une logique de rapprochement efficace, dans le respect de l’identité de chacun.

Sur les gels et surgels, vous pointez là un véritable problème. Il est difficile de mesurer la distorsion entre le budget voté et la réalité des crédits disponibles.

S’agissant des moyens aériens, nous possédons 56 hélicoptères. La logique actuelle est celle de la diminution de la flotte conjointement avec celle de la sécurité civile. Le problème se posera néanmoins outre-mer, en Guyane par exemple, où les hélicoptères sont essentiels. Il conviendra aussi de se recentrer sur notre coeur de métier. Nous possédons également 86 véhicules blindés à roue de la gendarmerie mobile (VBRG), qui sont par exemple une capacité essentielle outre-mer afin de protéger les gendarmes et dégager les axes. En métropole, ces blindés sont rarement engagés, mais constituent un outil appréciable à la disposition du gouvernement en cas de crise grave. Nos véhicules blindés ont une cinquantaine d’années mais fonctionnent ; ils pourraient tenir encore grâce au prélèvement de pièces détachées sur des engins dits « cannibalisés ».

Le montant budgété des OPEX en 2013 est de 11 millions sur le titre 2 et de 4 millions sur le hors titre 2., Des gendarmes ont été envoyés en Afghanistan jusqu’à cette année, ils ont travaillé sur la mise en place de la police afghane : il s’agissait de développer sa capacité à occuper l’espace et à lutter contre les trafics. Aujourd’hui, des gendarmes sont également présents en Irak, en Côte d’Ivoire, au Mali … Disposer d’une force de police à statut militaire constitue un véritable atout pour notre pays, également dans le cadre d’opérations de formation de forces de sécurité sur des théâtres extérieurs, comme nous avons pu le constater en Afghanistan et comme cela pourrait être le cas à l’avenir au MaliLa gendarmerie a aussi vocation à pouvoir intervenir hors de nos frontières.

Concernant le carburant, sa gestion est déconcentrée ; la consommation en 2013 sera en moyenne inférieure de 6%.

A cet égard, l’accord conclu récemment avec le ministère de la justice sur la reprise progressive par l’administration pénitentiaire de la charge de transfèrement assurée par les unités de police et de gendarmerie devrait nous permettre de réduire les déplacements, parfois sur de longs itinéraires. Le développement de l’usage de la visio-conférence relève de la même logique d’économies de carburant.

Enfin, concernant la loi Duflot, la gendarmerie bénéficiera d’une partie du produit des cessions et nous nous en félicitons.

M. Alain Gournac. – Pourriez-vous nous indiquer quel est le moral des troupes ? Également, pourriez-vous faire un point sur le contact avec les élus, qui semblait s’être éloigné ? Enfin, comment se passe l’harmonisation des systèmes de communications radios de la police et de la Gendarmerie ?

Soyez assuré, mon Général, que l’amour que les français portent à leur Gendarmerie ne changera pas ! Les gendarmes sont soutenus par la population.

M. Jean Besson. – Le logement est un problème ! Il doit devenir une priorité et le lien doit être fait avec les collectivités.

Vous avez évoqué la réserve opérationnelle, mais quid de la réserve citoyenne ? Elle contribue au patriotisme et au lien armée/nation et fournit un excellent travail qu’il ne faut pas oublier, d’autant plus que c’est du bénévolat.

M. Jacques Berthou. – L’enjeu, aujourd’hui, est celui de la cybersécurité et la lutte contre la cybercriminalité, qui nécessite de plus en plus de moyens. Mais comment lutter si vous ne pouvez pas acheter d’ordinateurs ?

S’agissant des gendarmes en Guyane, sont-ils considérés comme étant en OPEX ? Ils font un travail admirable, en particulier en termes de saisie de matériels.

Général Favier – Le moral est morose. Les gendarmes pensent qu’ils n’ont pas les moyens d’accomplir leurs missions. Ils ne demandent rien pour eux, ils aspirent juste à pouvoir faire leur travail dans de bonnes conditions.

Nous sommes dans une phase d’affermissement de la relation avec les élus. Nous travaillons avec l’association des maires de France pour renforcer encore la proximité.

S’agissant des systèmes de communication, il y a harmonisation de la gamme des matériels entre policiers et gendarmes. Un service commun a été créé, le service des technologies et des systèmes d’information de la sécurité intérieure, qui mutualise l’ensemble des demandes, des achats, et sera chargé, demain, d’élaborer le moyen de communication commun des forces de sécurité.

L’immobilier est notre préoccupation, d’autant plus que les conséquences sont fortes sur les conditions de vie des familles également.

La réserve citoyenne est de grande qualité, c’est une réserve de relais et confortant le lien avec la Nation. Je souhaite qu’elle s’améliore encore par un ciblage plus précis des personnes et de leurs capacités à consolider le rayonnement de l’institution.

Concernant la cybercriminalité, nous avons pris en compte la juste mesure de l’enjeu et nous nous adaptons ! Notre outil est performant et structuré avec un référentiel cyberdéfense. Notre système permet de lutter contre des fléaux tels que la pédopornographie, les arnaques aux moyens de paiements, … Pour soutenir notre action dans ce domaine, nous devrons renouveler prochainement notre parc informatique, ce qui induit d’en avoir les moyens, sinon nous serons en difficulté d’ici 2 à 3 ans.

Enfin, en Guyane, l’engagement est très dur, très fort, notamment sur la lutte contre l’orpaillage clandestin. Mais ce n’est pas un théâtre « OPEX »

M. Joël Guerriau. – Permettez-moi de saluer la nomination récente de la première femme au poste de général de la gendarmerie. A cet égard, qu’en est-il de la féminisation de la gendarmerie ?

S’agissant des OPEX, vous n’avez pas mentionné la Libye.

M. Robert del Picchia. – En Autriche, la fin du statut militaire de la gendarmerie a eu des répercussions assez négatives sur les rapports de la gendarmerie avec la population. Je voudrais vous poser deux questions. La première porte sur l’augmentation des cambriolages et les mesures prises par la gendarmerie pour lutter contre ce phénomène. La deuxième concerne l’usage des drones civils par la gendarmerie.

M. Jean-Claude Requier. – L’une des principales caractéristiques et la force de la gendarmerie nationale tenait à sa proximité avec la population et les élus locaux, notamment dans les zones rurales ou périurbaines. Ainsi, les rencontres des gendarmes avec le maire d’une commune étaient fréquentes, de même que la présence de la gendarmerie lors des inaugurations officielles. Or, ces dernières années, cette relation de proximité s’est quelque peu distendue. Je souhaiterais connaître, Mon Général, votre sentiment à ce sujet.

Mme Nathalie Goulet. – Mes collègues vont ont déjà interrogé sur plusieurs de mes préoccupations, qui portent notamment sur l’immobilier ou les OPEX. Je souhaiterais donc savoir comment nous pourrions vous aider dans la tâche difficile qui est la vôtre et savoir, parmi les principales priorités, celle qui vous semble la plus urgente.

M. Christian Namy. – Dans mon département, 70 % des logements des gendarmes sont des casernes locatives, construites par les collectivités locales.

La réorganisation des brigades territoriales, avec la mise en place des « communautés de brigades », a éloigné les gendarmes de la population. Ainsi, dans le cas d’un appel d’urgence, il faut parfois attendre un certain temps avant l’arrivée des gendarmes.

Or, face à la multiplication de la criminalité, notamment des cambriolages, en particulier dans les zones rurales ou périurbaines, cette situation peut contribuer à l’aggravation du sentiment d’insécurité au sein de la population.

Vous avez annoncé la création de 162 postes de gendarmes supplémentaires dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014. Mais, pourriez vous nous dire si ces gendarmes supplémentaires seront tous déployés sur le terrain, au sein des brigades départementales ?

Général Favier – Depuis mon arrivée à la tête de la direction générale de la gendarmerie nationale, j’ai fait du rapprochement de la gendarmerie avec les élus une priorité. Il est vrai que ces dernières années, en raison des réformes successives, les commandants de groupements ont été concentrés sur leurs tâches de gestion administrative et que les liens avec les élus se sont parfois un peu distendus. Je souhaite corriger cette tendance car il est très important, à mes yeux, de maintenir une relation de proximité de la gendarmerie avec les élus et la population.

Il est vrai aussi que l’organisation territoriale de la gendarmerie, construite depuis la Révolution française et tout au long du début du XIXème siècle, avec une brigade par canton, doit être adaptée aux évolutions de la délinquance et de la démographie et qu’une réflexion est nécessaire sur notre organisation. Maintenir trois brigades territoriales, dotées de faibles effectifs de l’ordre de six gendarmes, est parfois moins efficace que de regrouper ces brigades au sein d’une seule unité comptant une vingtaine de gendarmes.

M. Jean-Claude Peyronnet. – Un tel regroupement n’a-t-il pas pour effet d’éloigner encore plus les gendarmes de la population ?

Général Favier. – Non, car il est plus efficient d’organiser un service public de sécurité publique pertinent avec une brigade de vingt gendarmes plutôt qu’avec trois brigades de six. Cela permet ainsi de renforcer la présence des gendarmes sur le terrain, qui viennent au devant de la population et de ses besoins.

L’augmentation des cambriolages est une vraie préoccupation pour le ministre de l’Intérieur et pour la gendarmerie. Il a d’ailleurs présenté ses priorités dans un plan spécifique le 25 septembre dernier. La gendarmerie va orienter l’action de son personnel pour accentuer encore la lutte contre ce phénomène. Nous avons également des discussions avec certaines professions, comme les bijoutiers, ou les agriculteurs, pour renforcer la sécurité.

Les transferts de zone de compétences entre la police et la gendarmerie vont se poursuivre, à l’image de Romorantin où je crois que, malgré les inquiétudes initiales des élus, ce transfert s’est passé dans de bonnes conditions.

M. Jeanny Lorgeoux. – Je vous le confirme.

Général Favier. – S’agissant des drones, la gendarmerie mène une réflexion sur une utilisation de ces appareils pour contrôler certaines voies, comme les voies fluviales en Guyane ou le réseau ferroviaire. La question demeure toutefois de l’adaptation de la réglementation aérienne et ces moyens restent actuellement hors de portée budgétaire.

Comment m’aider et quelle serait la première des priorités ? Incontestablement, ma première préoccupation tient à la levée du gel et du surgel afin d’éviter un report de charges sur le budget pour 2014 et permettre à la gendarmerie de commander les véhicules, les ordinateurs et les moyens opérationnels, ce que je ne peux pas faire cette année à ce stade.

La féminisation de la gendarmerie se poursuit. Aujourd’hui, le taux de féminisation est de 17,5 %. Vous avez salué la nomination de la première femme au poste de général de brigade. Il n’existe plus aujourd’hui de barrières au sein de la gendarmerie à l’emploi de personnel féminin, à l’exception du maintien de l’ordre en gendarmerie mobile pour les sous-officiers.

Concernant la Libye, la gendarmerie est effectivement très présente puisque elle a assuré, dans des conditions très difficiles, la reprise des emprises diplomatiques françaises à Benghazi et à Tripoli et que deux gendarmes ont été grièvement blessés lors de l’attentat contre l’ambassade de France à Tripoli.

M. Daniel Reiner. – Comment se passent les relations de la gendarmerie avec les préfets ? La réforme de l’organisation ne va-t-elle pas conduire à remettre en cause le principe de l’obéissance hiérarchique et se traduire par un renforcement du rôle des préfets dans la gestion des unités ?

Général Favier. – Les relations entre les préfets et les commandants de groupement se passent très bien. Je pense que les préfets vous confirmeraient cette impression.

Sourcesenat www.senat.fr

#AAMFG intervention général FAVIER DGGN loi de finance 2014 sénat 

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